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El Periodico

Le 9 octobre dernier, Dynatech a organisé un dîner à l’Hôtel Boston de Saragosse en hommage à Adrián Uclés et Raúl Martínez, les alpinistes qui ont planté le drapeau de Dynatech au sommet de la montagne la plus froide du monde et la plus haute d’Amérique du Nord, le McKinley-Denali (6200 m, en Alaska).

Aux côtés de nos deux aventuriers et du personnel de Dynatech, étaient également présents Fran Lorente, auteur de toutes les chroniques quotidiennes transmises via satellite au cours de l’expédition, et Carlos Pauner, alpiniste professionnel et ami.

À la fin du dîner a eu lieu une brève cérémonie de remises de trophées commémoratifs de l’événement, suivie de la projection d’une vidéo de l’expédition.

À l’issue de la projection, toutes les personnes présentes ont pu écouter les détails de cette aventure, racontés par les véritables protagonistes de cette ascension. De nombreuses questions ont également été posées sur le monde de l’escalade, auxquelles les membres de notre expédition ont apporté toutes les réponses souhaitées, ainsi que Carlos Pauner, éminent spécialiste des sommets de plus de huit mille mètres d’altitude et invité de prestige, qui a donné un authentique cours magistral sur le monde de la montagne, ses difficultés et les limites de l’être humain dans cet environnement hostile.

L’événement a été couvert par la presse locale. Ci-joint l’article de référence.

Carlos Pauner, Adrian Uclés, Raúl Martínez und Fran Lorente

Carlos Pauner (en haut à gauche), Adrian Uclés, Raúl Martínez et Fran Lorente (en haut à droite)

 

Ils ont achevé la descente

Author: Raul Mtz
21 juin, 2009

« Bonjour à tous. Le jeudi 18, le jour s’est levé avec du mauvais temps au Camp IV. Nous nous sommes demandé s’il fallait descendre, il neigeait beaucoup et la visibilité était mauvaise. Les prévisions météo n’annonçaient pas d’amélioration, et nous n’avions pas non plus envie de rester plus longtemps sur le glacier dans ces conditions. Après discussion avec l’équipe autrichienne, nous avons décidé de former une cordée solide de cinq personnes et d’entreprendre la descente. Cela nous permettrait d’avancer avec plus de sécurité. Sans plus attendre, nous avons donc remballé et chargé notre matériel sur deux pulkas et dans les sacs à dos, puis nous avons entamé la descente. La première étape jusqu’au Camp III a été dure. Nous avons pratiquement ouvert la piste, la neige gênait beaucoup notre avancée, et le terrain, constitué de côtes moyennes et de fortes pentes rendait difficile la progression avec les traîneaux. Après plus de deux heures, nous sommes arrivés au Camp III. Là, nous attendait une charge supplémentaire de matériel laissé en dépôt, nos skis, de la nourriture et le troisième traîneau. En raison des fortes chutes de neige, il nous a fallu pas mal de temps et beaucoup d’effort pour exhumer à la pelle l’ensemble de notre équipement. Les Autrichiens ont fait de même avec leur matériel, puis enfin, avec cinq traîneaux, nous avons repris la route. À partir de là, le terrain est moins abrupt, mais le chargement plus pesant ; de plus, à mesure que nous descendions sur le glacier, le risque de tomber dans une crevasse augmentait, il fallait donc être de plus en plus prudent. L’accident survenu le jour précédent aux membres de l’expédition de Malaga nous rappelait qu’il ne fallait pas baisser la garde.

Après de longues heures de marche nous avons atteint le Camp I. Le temps s’était amélioré, il ne neigeait plus, mais le soleil se cachait déjà derrière les montagnes, et même si au cours de ces mois en Alaska, il ne disparaît jamais vraiment, les températures chutent brusquement lorsque tombe la « nuit ». Il était 21h00 et transis de froid, nous nous sommes mis à cuisiner un peu pour reprendre des forces et à faire fondre de la neige pour boire. Ici aussi, il nous a fallu déterrer un dépôt de nourriture et de déchets. En partant le matin nous avions décidé exactement où nous voulions arriver. Nous marchions depuis plus de huit heures et nous étions fatigués. Il nous restait encore environ onze kilomètres, dont sept de descente légère et quatre d’ascension jusqu’au camp de base. L’une des options était de dormir ici et de repartir le lendemain, mais finalement nous avons choisi de continuer. Le glacier avait perdu beaucoup en qualité depuis notre entrée dans le parc. Les températures élevées des premiers jours, ajoutées aux chutes de neige de ces derniers jours, l’avaient converti en un labyrinthe de crevasses qu’il fallait éviter. Les basses températures de la nuit compactent la neige, ce qui permet d’avancer à ces heures avec plus de sécurité. De sorte qu’à onze heures, nous nous sommes remis en route, et en serrant les dents, nous avons entamé notre dernière étape dans la montagne. Cela s’est révélé particulièrement difficile, la qualité de la neige était vraiment mauvaise, c’était une véritable épreuve de progresser avec les pulkas et le chargement, et les heures de marche commençaient à se faire ressentir dans les jambes et le dos. Le bruit des avalanches nous a accompagné tout au long de cette dernière étape, faisant violemment irruption dans le silence de la nuit glaciaire. Nous nous sommes fait plusieurs frayeurs, en évitant de justesse de mettre le pied dans une crevasse, puis finalement, nous sommes arrivés au lieu appelé « Heatbreak Hill », « la côte brise-cœur ». Elle porte vraiment bien son nom, car quand vous arrivez là et que vous voyez la hauteur à laquelle se situe le camp de base (dénivellation de 300 mètres), et que vous imaginez combien ces quatre kilomètres vont être longs, cela vous brise le cœur, mais pas seulement, l’âme aussi. Mais c’est la dure réalité des expéditions, une épreuve de force et de résistance, dans laquelle il faut tout donner, jusqu’à la fin. Il est dit qu’on n’a pas atteint le sommet tant qu’on n’est pas arrivé au camp de base, dans ce cas précis, le camp de base est un sommet en lui-même.

Enfin, après plus de douze heures d’effort, nous avons planté notre tente et à deux heures du matin, le vendredi, nous nous sommes disposés à dormir quelques heures, en espérant pouvoir nous envoler le lendemain. Cela n’a pas été une nuit agréable, les suées nous refroidissaient à l’intérieur des sacs de couchage, qui ont fini détrempés, mais tout cela n’avait plus d’importance, nous étions si proches de cette douche chaude et de ces vêtements propres tant attendus.

Une chaise en toile et une veste laissée dehors pas les Rangers nous rassuraient et nous laissaient croire qu’ils prévoyaient du beau temps, et que les avions pourraient effectivement voler. Il n’est pas rare dans cette montagne de devoir attendre plusieurs jours au camp de base en raison de la rigueur du climat.

Alors que nous venions à peine de trouver le sommeil, une voix féminine nous a réveillé, c’était Lisa, la Ranger responsable du camp de base qui nous demandait depuis l’extérieur de la tente si nous voulions prendre un vol, une avionnette de notre compagnie allait atterrir dans une demi-heure. La joie fit que nos corps ramollis rencontrèrent une réserve d’énergie et un instant tout l’équipement était de nouveau dans les sacs à dos et sur les pulkas, oui, de nouveau tout sur le dos et les traîneaux, car dans cette montagne interminable, il fallait encore effectuer une ascension. En raison de la qualité de la neige, de plus en plus mauvaise, les avions avaient besoin de plus de terrain pour pouvoir décoller. C’est pourquoi une fois encore, plus d’une demi-heure à tirer un chargement plus lourd que jamais, nous avions de fait déterrer le dépôt de nourriture laissé dans le camp de base au cas où nous devrions rester ici plusieurs jours. Enfin, vers dix heures du matin, tout était chargé à bord, et sans problème, Paúl, un pilote expert et vétéran décollait, pendant que nous profitions de la fantastique vue aérienne sur cet imposant glacier. Alors que nous survolions Denali, les images de ces neiges et de ces montagnes se mêlaient aux moments vécus, des jours d’efforts et de vie en commun qui resteront à jamais dans notre mémoire.

Le mont McKinley, Denali pour les autochtones, s’est converti en un défi plus dur à relever que ce que nous avions imaginé. Le fait de devoir tout transporter soi-même jusqu’en haut, en plus de la dénivellation de plus de 4000 mètres à surmonter, lui confère une rudesse extraordinaire. La climatologie, qui dans cette montagne est l’un des facteurs déterminants, nous a été favorable, mais nous a aussi obligé à parier sur un démarrage rapide, étant donné que les prévisions n’étaient pas encourageantes pour les jours suivants, comme cela s’est effectivement confirmé. Cela nous a conduit à attaquer rapidement le sommet, sans énormément d’acclimatation, une stratégie risquée et qui s’est fait ressentir sur l’un des membres de l’expédition, mais c’est la météo qui décidait.

 

Nous avons atterri à Talkeetna et en arrivant à l’hôtel, nous avons connu plusieurs moments de joie. Le premier, de nous retrouver avec l’expédition de Malaga, et d’avoir la confirmation que l’accident dans la crevasse avait surtout causé une grande frayeur et quelques côtes cassées chez l’un des membres. La douche tant attendue a été le deuxième moment de bonheur à savourer, après douze jours de sueur et peu de changements de vêtements, c’est vraiment nécessaire.

Mais la plus grande joie de toutes a été le moment d’ouvrir l’ordinateur et de lire les chroniques de notre aventure sur le site Web de Dynatech. Les messages de tout le monde, familles et amis, nous ont émus, et tous trois avons lu avec les larmes aux yeux ce que Fran vous avait rédigé de sa plume experte, et vos messages de soutien. Même si la technologie n’arrive pas si haut, il est certain que d’une manière ou d’une autre, ces encouragements nous sont parvenus là-haut, et nous ont donné des forces dans les moments difficiles.

 

Nous tenons à remercier tous ceux qui ont rendu possible cette aventure : Dynatech, notre principal sponsor, Autoescuela San Mateo de Monzón, l’association sportive Patronato de Deportes de Monzón et la circonscription de Cinca Medio.

Nous souhaitons aussi adresser un remerciement spécial à Francisco Lorente, « Fran », qui de manière si extraordinaire vous a raconté ce que nous avons vécu. En le lisant, il nous a paru qu’il était ici avec nous. Merci Fran, et merci à tous pour vos messages de soutien. Comme le disait Fran dans l’une de ses chroniques, « une expédition qui a été une réussite ; ils sont tous revenus, ils sont revenus sains et saufs, et ils sont revenus plus amis que jamais… ». Dans ce cas précis, nous ajoutons un quatrième moment de réussite et de célébration, la véritable joie de l’expédition a été de vous lire et de sentir votre présence.

Depuis Talkeetna, Alaska, nous vous embrassons tous très fort. Les Raúl et Adrián ». 

  

Camp IV enneigé

Incertitude jusqu’à la fin. Les prévisions météorologiques ne sont pas bonnes. De plus, il devient difficile de s’y fier. Les abondantes chutes de neige de ces derniers jours rendent cette aventure de plus en plus difficile. Les deux Raúl et Adrián n’en n’ont pas fini avec cette montagne. Il faut encore redescendre, et ils vont devoir le faire dans des conditions plus que délicates.

Les chutes de neige ont effacé la piste, et il est à parier que la neige aura aussi recouvert le matériel laissé en dépôt au CIII, (pulkas, skis, déchets et un peu de nourriture). Raúl nous indiquait qu’ils allaient descendre en cordée, ils vont se joindre à deux Autrichiens pour former une cordée résistante, un groupe solide de cinq personnes qui peuvent travailler en équipe et assurer au maximum la descente. Lorsqu’ils arriveront au CIII, un dur travail à la pelle les attend, pour exhumer leur matériel. À partir de là, ils devront à nouveau analyser la descente jusqu’au CII ou CI. Les Autrichiens n’ont pas de skis, ce qui retarderait nos alpinistes. Mais si les conditions ne sont pas favorables, ils devront analyser la situation et prendre une décision.

Les nouvelles ne sont pas encourageantes : hier, un groupe d’alpinistes est tombé dans une crevasse recouverte par la neige ; heureusement, ils s’en sont plutôt bien sortis, une personne avec plusieurs côtes cassées et une autre avec des lésions à évaluer par les médecins.

Les crevasses à éviter lors de l’ascension étaient découvertes et bien visibles ; elles se sont désormais transformées en pièges mortels. Les alpinistes savent qu’elles sont présentes, mais ils ne savent pas où elles se situent exactement, pour certaines on devine leur emplacement, pour d’autres non. De plus, il faut effectuer ce parcours au milieu d’une tempête de neige, en ouvrant la piste, en s’enfonçant jusqu’à l’on ne sait où. Cette montagne ne leur a pas facilité la tâche, mais la récompense, le véritable sommet, est à Talkeetna, et tant qu’ils n’y sont pas parvenus, ils ne peuvent pas se relâcher.

Le Denali les met à l’épreuve, jusqu’à la fin, et jour après jour, ils surmontent cette épreuve.

Ils ont pour intention de descendre, et descendre encore, et s’ils peuvent descendre un peu plus, ils continueront à le faire, sans destination précise (CIII, CII, CI) ; lorsqu’ils décideront de s’arrêter pour dormir, ils nous communiqueront leur position, leurs peines et leurs plans.

Ils ont bon moral, mais ils restent prudents.

Campo IV Medical Camp Medical Camp (4.328 m)

 À 16h35 (Alaska), Adrián Uclés et Raúl Martínez sont arrivés au CIV, où ils ont retrouvé Raúl Ruiz. Les trois se trouvaient en parfaite condition physique. Il leur reste désormais la descente, mais avant cela, ils doivent organiser leur chargement et se reposer.

 

 

raul-martinez-en-la-cumbre-del-denali-6194

Raúl Martínez en la cumbre del Denali (6194)

“Le sommet, nous avons atteint le sommet, nous sommes extenués mais nous sommes parvenus au plus haut point ; plus haut, il n’y avait plus rien … Merci à tous de votre soutien, nous y avons été sensibles, nous avons ressenti les encouragements de vous tous qui nous aimez et nous réconfortez… Merci à notre principal sponsor, Dynatech-elevation, merci aussi aux institutions de Monzón, à la circonscription de Cinca Medio et à la municipalité de Monzón… Une pensée aussi pour la Fédération aragonaise d’alpinisme….”

 

Des mots haletants et remplis d’émotion, prononcés par un Raúl Martínez éreinté, rompu par le terrible effort qu’ils ont réalisés, Adrián Uclés et lui, pour culminer à 6194 m, au plus haut du Denali.

Pour en arriver là, cela n’a pas été facile : les entraînements, la recherche de sponsors qui croient en leur projet, dans une période aussi difficile que celle que nous vivons… Les frais que cela suppose, les achats… Le vol jusqu’à Anchorage, le transfert en autobus jusqu’à Talkeetna, un autre vol à destination de Kahiltna (2225 m), le transport de 50 kg de matériel en pulkas jusqu’à Ski Hill (2408 m), plus le trait des pulkas jusqu’à Kahiltna Pass (3048 m), puis Motorcycle Hill (3353 m), plus haut, Basin Camp ou Medical Camp (4328 m), portages jusqu’à Ridge Camp (4938 m) ; et enfin… les journées décisives.

Les deux Raúl et Adrián sont partis d’un pas décidé vers le CV, convaincus qu’il s’agissait de l’un des meilleurs moments, la météo donnait le milieu de la semaine comme moment le plus favorable, et ils devaient être là, se tenir prêts pour bomber le torse et se donner corps et âme. Mais… l’équipe a commencé à accuser le coup, beaucoup d’usure accumulée. Lorsqu’ils sont parvenus à l’arête, Raúl Ruiz a décidé d’abandonner, il était très fatigué, il n’en pouvait plus, il était conscient qu’il restait encore la descente et il n’était pas en conditions de continuer. Raúl R était arrivé à ce point de fléchissement où il devait choisir entre se diriger vers le haut ou vers le bas. Il pensait que s’il décidait de continuer, il pourrait se convertir en une charge pour l’équipe. Cette pensée fut décisive et il est aussitôt redescendu vers le CIV. L’histoire de l’alpinisme est remplie de gestes de ce type. Des hommes qui laissent leur ego et les lauriers de côté et font demi-tour. Sage décision, qui honore celui qui la prend. Il a effectué un travail fondamental dans cette aventure.

Adrián Uclés et Raúl Martínez, après un clin d’œil de compréhension, ont laissé leur compagnon derrière eux, avec l’intention de faire valoir son effort et d’arriver un peu plus haut. Ils ont passé la nuit au CV et se sont mis en route vers le sommet, d’un pas lourd et lent, mais d’un pas qui gravit, d’un pas décidé, déchirant le matin glacé.  Un pas après l’autre, en progressant lentement, sans dire un mot, le silence interrompu par le bruit de la glace brisée par les crampons. Et après huit heures d’épreuve, à 18h30, ils ont atteint le point le plus haut de l’Amérique du Nord, le sommet si convoité du Denali. Ils sont tombés dans les bras l’un de l’autre, emportés par l’émotion, et leurs visages se sont illuminés d’un sourire disparate, une grande partie de leurs pensées a été vers le CIV et Raúl Ruiz, lui aussi était là-bas. Ils ont entamé la descente vers le CV, qu’ils ont achevée en trois heures. Dans ce lieu malheureux, ils sont entrés en communication avec nous pour partager leur joie, leur exploit.

Il reste désormais la descente par les cordes fixes et au bout des cordes, Raúl, au CIV. Autre moment unique, moment pendant lequel ils savoureront l’authentique exploit, le retour.

Un célèbre alpiniste disait : « une expédition qui a été une triple réussite ; ils sont tous revenus, ils sont revenus sains et saufs, et ils sont revenus plus amis que jamais… »

 

Ils nous informeront de leur arrivée au CIV dès que possible.

Nous n’avons pas de nouvelles de nos alpinistes pour le moment. À cet instant, ils sont vraisemblablement en train de dormir dans un camp en altitude, ou en route vers le sommet. Nous espérons recevoir de leurs nouvelles au cours de la journée.

Dès que nous disposerons d’informations, nous vous les communiquerons.

16 juin, 2009

Le dénouement est proche… Dans quelques heures, un jour peut-être, nous connaîtrons le sort de nos alpinistes.

Ils ont repris l’ascension vers le CV, ils ont à nouveau surmonté l’épreuve des cordes fixes. Ils vont se trouver face à la West Buttress, l’arête qui donne son nom à la voie. Cette arête est très exposée, même si elle est jalonnée d’ancrages et de cordes fixes qui sécurisent la progression. La plus grande difficulté à laquelle ils seront confrontés sera le vent, qui a pour habitude de souffler fort, rendant parfois délicate l’ascension de l’arête.

La journée n’est pas particulièrement favorable, mais pour tenter d’atteindre le sommet il faut se mettre en route maintenant et sans retard. Les prévisions annoncent un temps stable pour la journée de mardi ou mercredi.

Leurs corps sont endurcis, Adrián mène deux combats, le défi des pentes du Denali et sa douleur lombaire. Il n’est certes pas gracieux, mais il veut tout donner, lutter jusqu’au bout. Les Raúl sont fatigués, mais en meilleure condition qu’Adrián. La répartition du chargement s’est faite proportionnellement à la résistance actuelle de chacun. Cela aidera à ce que tous les trois arrivent au plus haut point du défi.

Ils luttent bec et ongles, leurs voix se font de plus en plus faibles mais nous transmettent de la tranquillité. Les communications ne sont pas bonnes, les messages sont entrecoupés, les dialogues sont lents, les pensées de longs silences.

Des moments d’incertitude nous attendent, des instants diffus. Ils savent que nous sommes attentifs à chacun de leurs mouvements, que nous leur apportons notre soutien, et cela les réconforte, les encourage.

Nous espérons que les communications pourront s’établir normalement, mais pour le moment, il s’agit d’économiser la batterie du satellite, il faut communiquer un bref instant et en profiter au maximum ; de plus, le relief de cette montagne crée des zones ombragées qui rendent difficiles la transmission. Nous continuerons donc à informer dès que nous recevrons des nouvelles.

Merci de votre soutien.

15 juin, 2009

Aujourd’hui est un jour de repos, si l’on peut dire : en altitude, on ne se repose jamais totalement. Il serait plus correct de dire que c’est une journée d’inactivité. Nous reposons nos corps malmenés sur un sac de couchage en plume bien confortable, qui nous isole du sol. Nous nous serrons tous les trois dans une tente minuscule, dans laquelle il faut demander la permission au voisin pour faire le moindre mouvement. À l’extérieur, il neige, et le vent souffle par rafales, secouant notre abri si fragile.  Le silence règne. Nous avons fait le tour de la conversation, on s’est tout dit. Le jeu de cartes humide a rempli sa mission, l’espace d’un instant. Le temps passe lentement. Nous dormons, nous faisons de l’eau, nous sortons quelques instants pour se dégourdir les jambes, et ainsi de suite plusieurs fois dans la journée. Nous attendons l’heure du déjeuner… puis l’heure du dîner… Nous ouvrons la fermeture Éclair de notre tanière, et nous nous penchons pour regarder encore une fois le parcours. Nous avons l’esprit tranquille, nous savons que nous avons bien fait nos devoirs. Il ne reste plus désormais que l’examen final, nous révisons mentalement, en silence, la route de l’ascension. Nous nous concentrons sur l’arête. Il va falloir être prudents, marcher d’un pas lent et décidé, nous espérons que le vent ne sera pas de la partie, que la journée sera froide et sereine, nous nous attendons à avancer dans la souffrance, mais à avancer, en espérant atteindre le sommet dans un moment de clarté, un moment où l’on puisse voir l’infini et se serrer dans les bras tous les trois, que nos visages esquissent un large sourire, et que l’on puisse communiquer par téléphone satellite pour partager notre joie avec nos familles et nos amis. Pouvoir remercier tous ceux qui nous ont aidés, en particulier Dynatech-elevation, pour leur soutien…
Çà alors… Je me suis rendormi! L’espace d’un instant j’ai rêvé que j’avançais sur l’arête…

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Raúl Martínez

14 juin, 2009

Le mauvais temps est la fausse note du jour. Ils ont atteint les 5100 m et une chute de neige inattendue leur a bloqué le passage. De plus, Adrián souffre d’une douleur dans la zone lombaire, probablement due à l’effort pratiqué pour tirer la pulka lors des jours précédents. Adrián n’y accordait que peu d’importance – « Une bonne journée de repos sera certainement le meilleur des traitements ».

Avant de descendre, ils ont laissé une partie de leur matériel ; pendant la descente, la neige et la faible visibilité ont été constamment présentes ; guidés par les cordes fixes, ils ont effectué la descente jusqu’à rejoindre la chaleur du CIV. C’est curieux, la chaleur du CIV… Le CIV, à 4328 m, entouré de neige, à quatre jours de la civilisation, devient notre foyer. Un lieu où l’on se sent protégé. Un lieu où après l’effort, on se repose, on se détend, on réfléchit et se régénère.

Mais même au cœur de la misère et des pénuries surgit quelque chose de positif, quelque chose qui remonte le moral. Ils ont rencontré un vieil ami, l’équatorien Iván Vallejo, qui redescendait du sommet. Ivancito (petit Ivan) pour les amis, est un professeur d’université en mathématiques, reconverti à l’alpinisme. Nous l’avions rencontré dans le Nanga Parbat au Pakistan, alors qu’il travaillait pour l’émission de la chaîne de télévision espagnole TVE « Al filo de lo imposible » (aux frontières de l’impossible, un programme d’aventure). Dans cette montagne, nous avons beaucoup souffert, mais nous avons aussi passé de « super » bons moments avec lui, et l’année dernière, il nous a rendu visite et nous avons passé quelques jours ensemble à Saragosse. Ivancito les a salués sans les reconnaître, mais une voix familière a réveillé Raúl de la léthargie dans laquelle l’altitude l’avait plongé. Quand ils se sont reconnus, ils se sont jetés dans les bras l’un de l’autre. Sans aucun doute, Raúl et Iván ont repris leurs chemins respectifs avec un sourire qui, l’espace d’un instant, les a transporté loin des pentes du Denali.

Les prévisions météo ne sont pas bonnes et ils ont l’intention de se reposer. Entre-temps, ils attendront que la neige se fixe sur la montagne et qu’Adrián se remette de sa douleur dans le dos.

 

 

13 juin, 2009

Les communications depuis ce lieu ne sont pas bonnes, le ciel est ombragé, ce qui ne favorise pas la couverture.

L’intention des alpinistes est de parfaire leur acclimatation grâce au portage, ils souhaitent rejoindre le CV Ridge Camp (4938 m). Durant le trajet jusqu’à ce campement, ils effectueront l’ascension de pentes de 45-60º, et attaqueront les 250 m de cordes fixes qui précèdent le col.

Ils sont conscients que la progression ne sera pas la même que celle de ces derniers jours. Raúl Martínez nous indiquait que l’arête était dangereuse en raison du vent, et qu’au moindre risque ils se délesteraient de leur matériel et descendraient, mais que de toute façon ils tenteraient de se rapprocher le plus possible du corridor, de cette manière à la prochaine attaque ils aborderaient les cordes fixes avec plus de légèreté.

On les sent fatigués, ce sont plusieurs jours d’effort accumulé et de vie dans des conditions difficiles. Au niveau alimentaire, l’inappétence en altitude et un facteur contre lequel il faut lutter. Un autre travail de titan consiste à faire de l’eau : ils doivent l’extraire en faisant fondre la neige, il est recommandé de boire 4 litres par personne. Dormir sur une surface enneigée suppose, même si l’on dispose d’un bon équipement, passer une grande partie de la nuit en somnolant, ce qui n’est pas pareil que dormir. Cela use, petit à petit, physiquement et psychologiquement ; un obstacle de plus qu’il faut affronter, qu’il faut surmonter.

Les prévisions météorologiques ne sont pas claires, il semble que les conditions devraient s’améliorer légèrement mardi soir, mais il convient de confronter cette information aux bulletins météo des Rangers.

Alors que Raúl nous donnait des indications sur son moral, la communication était entrecoupée, puis s’est totalement coupée. Il est à espérer que demain, les communications seront plus faciles.